La Saint-Georges
Passez, bons peuples.
L'appel de l'honneur ne vous reveillera pas
Les cadeaux de la liberté
Ne sont rien pour des troupeaux.
Ils doivent être abattus et tondus...
A.S.Pouchkine
Peuple, réjouis-toi! Vous les vieux, vous le jeunes.
Aujourd'hui, louez Dieu et louez votre roi,
Car c'est la fête de Saint-Georges.
Un troupeau de moutons
Hier aussi bêlait en suivant son berger.
Ce roi berger insouciant est stupide
Comme tous les rois de la terre,
Menait ses moutons avec sa houlette,
Avec ces bons chiens, ministres fidèles
Sans portefeuille, bénévoles.
Si un vrai souverain l'eût vu il aurait dit:
"Que ce troupeau a de la chance, il vit
Plus heureux que mon peuple même!"
Et le troupeau chemine avec ses blancs agneaux,
Il chemine, se traîne, épuisé par la route,
Pour que tous les agneaux passent sous le couteau
En l'honneur de Saint-Georges,
Ce brigand sanctifié, putréfié, sans cervelle.
Est-ce lui qui veut des victimes?
Non c'est le berger qui les veut,
C'est le ventre affamé, le gosier altéré
D'un pope ivre au nom de Saint-Georges,
De même que de toi, peuple, le roi exige
Des victimes dans ces harems épouvantables,
Pour lui et pour tous ceux
Qui te torturent, qui t"oppriment,
Et tu leur donnes ta sœur
Et tu verses ton sang pour eux;
Plus ils te frappent, plus tu danses.
Vois: aujourd'hui, riches et pauvres
Ivres, là-bas, chantent ensemble;
Avec le pope, ils louent Dieu et leur souverain...
Peuple, réjouis-toi. Ainsi les moutons bêlent
En cheminant tout doucement avec les chiens
Derrière le berger.
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